Voyage

Un chemin qui vaut le détour: route des volcans, la Palma

Route des volcans, La Palma ou La isla Bonita. L’île qui réalise tous vos souhaits, l’île magique. Encore faut-il se rappeler ce qu’on demande…

Depuis plusieurs jours, la route des volcans m’appelle. Je connais déjà la pointe de l’île, le volcan Ténéguia, rentré en éruption en 1971. Autour de lui tout est noir, comme une fin du monde, ou le début d’un autre. La végétation n’a pas encore eu le temps de repousser sur cette nouvelle partie de l’île.

Quand tu pars confiante…

Mais ça n’est pas là que je vais. Je commence à El Pilar, sur les volcans plus anciens, les grands frères. Ceux qui ont eu le temps de faire de leurs pierres de lave brutes une fine poussière noire sur laquelle poussent les pins canariens. Les résistants. Ils survivent à la foudre, à la lave, aux vents des sommets, aux pluies battantes, au très chaud comme au très froid. Leur écorce noire contraste avec le vert étincelant de leurs aiguilles qui ressemblent à des pelotes douces. J’adore ces arbres. Ils poussent parfois dans des formes invraisemblables, comme si ils dansaient avec la Terre.

Me voilà donc en haut à environ 900 mètres, à 9h du matin après un bus et un taxi. Fin prête pour 17 KM, 1200 mètres dénivelé et 6 heures de marche en compagnie des volcans.

6h ? Non, un peu plus mais ça je ne le sais pas encore.

Je commence à marcher, émerveillée par les pins, l’odeur de la forêt, les lumières qui jouent dans les aiguilles de pin. J’ai la sensation d’être dans un manga de Myazaki, j’ai des flashs du Japon où je n’ai jamais mis les pieds. Peu importe, je me laisse traverser. Et je photographie, le sourire aux lèvres.

Je marche doucement pour ne pas effrayer la forêt, pour ne pas perdre cette onde de magie qui m’enveloppe. C’est comme si on me chantait une berceuse. Et j’avance dans cet état de béatitude bienheureuse.

Sauf qu’au bout d’un moment, je dois me rendre à l’évidence, il n’y a plus vraiment de chemin. Ok, je suis perdue. Ca me fait sourire, je me sens accompagnée, pas de problème.

Je laisse mon corps m’indiquer la direction. Mon bras se tend à droite, ma tête me dit de plutôt faire demi-tour. Que nenni, je suis le bras. J’arrive devant un chemin qui n’est visiblement pas le bon. Mon bras m’indique à droite encore et j’ai l’image d’un chemin un peu plus haut. Je marche 5 minutes et effectivement, il y a un chemin, avec une croix rouge.

Je décide de le prendre. En avançant encore je constate que le chemin s’arrête. Ma tête pivote et c’est comme si on m’indiquait la pente à pic qui grimpe en haut du volcan. Et selon mon sens de l’orientation, oui ça paraît logique. Je n’ai qu’à monter la pente et je retrouverais le chemin. Me voilà donc à quatre pattes à essayer de ne pas dévaler sur le tapis d’aiguilles qui recouvre le sol, et qui glisse. Je finis par arriver au sommet, essoufflée mais souriante. Pour découvrir un autre sommet.

Le spectacle est magnifique. La lune finit de disparaître d’un côté tandis que j’ai une vue panoramique de l’autre. Je m’assois et profite. Beau cadeau.

En regardant un peu aux alentours, je vois que je ne peux pas redescendre, il me faut grimper l’autre sommet. Vu d’ici ça a l’air facile. Parfait, il y a sûrement un chemin derrière et de toute façon la pente n’est pas très raide.

Sur l’autre versant un peu plus bas, je vois deux chiens qui aboient vers moi et qui ont l’air de chercher à me rejoindre. Ca interrompt aussitôt ma méditation et mon cerveau me met un coup de pied aux fesses pour enclencher le mouvement (oui mon cerveau est contorsionniste). C’est le cœur un peu battant (parce que oui ce même cerveau donc, a encore quelques mauvais souvenirs de chiens errants dans des coins pommés lors de mes précédents voyages) que je m’attèle à l’autre pente.

Et là Ô stupeur et effet de perspective : c’est bien plus raide que ce que je pensais. De nouveau à quatre pattes sur la poussière de lave je ne regarde SURTOUT PAS sur ma droite. Je me vois déjà dévaler jusqu’en bas. Les larmes montent un peu, petite crise de panique et tremblements. Mais je continue à grimper. Je me dis que les esprits du coin m’ont joué un mauvais tour et je ne trouve pas ça très sympa. Je respire, me remet tant bien que mal en présence dans mon corps et avant que je ne me mette à râler pour évacuer tout mon stress, je me rends compte que je suis arrivée sur un chemin. Et cadeau : la vue est magique à 360°.

Je continue à marcher et je rejoins le bon chemin de rando. Ca va, je n’ai fait qu’un détour de deux heures… La marche de 6 heures peut donc commencer.

Un détour pour mieux se retrouver

En marchant je laisse l’expérience de mon détour improvisé infuser. Je me dis que ça a du correspondre à quelque chose que j’ai demandé. Mais quoi ?

Puis la métaphore du chemin arrive. Qu’est-ce que j’ai fait en étant perdue ? J’ai suivi mon intuition, j’ai continué à marcher. J’ai grimpé la pente, puis la suivante, même quand j’ai eu peur. Ce qui m’a fait le plus peur pendant un instant était d’être perdue. De ne plus trouver mon chemin. Mais tout ce que je pouvais faire, c’était de continuer à marcher, à avancer avec la confiance, la certitude que de toute façon le chemin je le retrouverais. Parce qu’il n’y avait pas d’autre option possible, pas de retour en arrière. J’allais retrouver un chemin, à un moment ou un autre. Question de logique (en tout cas la mienne…)

Autant vous dire que ce jour-là j’ai eu l’une des plus belles réponses à certaines de mes interrogations, moi qui avait l’impression de m’être un peu perdue sur ma route intérieure.

D’autres personnes à qui j’ai raconté cette histoire plus tard et qui connaissaient bien les environs m’ont dit : « Mais comment tu as fait ? Il est impossible de se perdre sur ce chemin ! ». Voilà, très fière de moi je pouvais dire que j’avais fait un truc impossible ce jour-là.

Aujourd’hui je sais que je n’étais pas perdue, j’ai juste suivie MON chemin, là où il fallait que j’aille pour vivre MON expérience. Même si ça fait peur.

La suite de la randonnée a été magique, encore plus. J’ai goûté intérieurement toutes les énergies, tous les paysages que je traversais. Et vraiment, j’ai eu un sentiment de liberté, d’avoir un chemin pour moi toute seule. Hors des sentiers battus, c’est le cas de le dire.

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